François-Vivien Guiot nommé membre junior de l’IUFUne chaire de 5 ans pour réfléchir à l’identité européenne

Arrivé en 2019 au sein du Collège d’Etudes européennes et internationales (EEI) et au CDRE (Centre de Documentation et de Recherches Européennes en tant que maître de conférences, François-Vivien Guiot vient d’intégrer l’Institut Universitaire de France (IUF).
Quel est votre parcours ?
Après deux années passées à l’Université Toulouse 1 Capitole, cela fait maintenant six ans que j’occupe un poste de maître de conférences à l’UPPA. Ayant réalisé mon doctorat à Bordeaux, je suis donc très attaché à l’idée que le sud-ouest puisse offrir un enseignement supérieur de qualité, tout en tirant profit d’une qualité de vie certaine.
Je suis enseignant-chercheur spécialisé en droit européen, même si je cultive l’interdisciplinarité depuis ma thèse qui tentait de faire des ponts entre le contentieux européen, le droit administratif interne et la théorie du droit. Dans cette logique, j’essaie désormais de faire dialoguer, dans la mesure de mes capacités, le droit avec d’autres sciences sociales.
Depuis cette approche ouverte, je porte mon regard sur des objets variés comme la constitutionnalisation de l’Europe, l’hybridation des ordres juridiques ou encore la transnationalisation du droit.
Que représente pour vous et pour l’établissement votre intégration à l’IUF?
Ma candidature à une chaire IUF est autant le résultat d’une politique de l’établissement que d’une démarche personnelle. L’établissement nous pousse effectivement à répondre aux divers appels à projet ouverts par les partenaires scientifiques et publics nationaux et européens. Ce travail, parfois ingrat, permet de développer nos capacités de recherche et d’accroitre la visibilité de l’Université.
Du point de vue personnel, l’obtention d’une chaire est une opportunité exceptionnelle du fait de la durée de la délégation (cinq ans), et des moyens (décharge des 2/3 des obligations d’enseignement et dotation de crédits de recherche) qui sont accordés par l’Institut pour mettre en œuvre cette délégation « hors les murs ». En effet, dans un contexte où le quotidien des enseignants-chercheurs rend toujours plus complexe la sanctuarisation du temps nécessaire à la recherche, j’ai bien conscience que le projet IUF constitue un privilège. Il ne serait d’ailleurs pas possible de profiter de cette opportunité personnelle sans la solidarité des collègues, je souhaite donc les en remercier sincèrement.
Quel est le programme que vous comptez mettre en œuvre ?
S’agissant de la chaire, elle constitue une extension de recherches menées sur l’identité européenne. Je poursuis en effet une interrogation sur la nature de l’Union européenne et sur son rapport à la puissance publique dans mes différents travaux. Dans un contexte marqué par une « souveraineté européenne » émergente, comme par le « retour des États », l’analyse du droit à l’aune de cette figure doit être en capacité de proposer une explication des restructurations en cours de l’espace public européen.
Dans cette perspective, j’ai proposé à l’IUF de poursuivre une hypothèse délaissée : celle selon laquelle l’Europe incarnerait une forme particulière d’organisation de la vie publique qui ne serait pas sans lien avec le modèle de l’empire.
Sans revendiquer toutes les caractéristiques historiques de cette forme d’organisation du pouvoir, le processus d’intégration européenne entretiendrait en effet un rapport de définition avec l’empire dans une double relation d’adhésion et d’opposition.
Souveraineté et anti-empire ?
Dans la première, la mise en regard de l’Union avec l’empire pourrait ainsi éclairer l’aménagement si particulier de la puissance et de la souveraineté sur le territoire européen, le rapport dialectique entre l’unité et la diversité, ou encore la question de ses frontières.
Dans la relation d’opposition, l’intégration européenne se constituerait comme une forme d’anti-empire (par référence au mouvement de l’antiphilosophie), sous le double sens du syntagme ainsi proposé : d’une part, l’Europe a fait le choix de renoncer à certaines caractéristiques historiques de l’empire incompatibles avec la modernité, la démocratie, ou les valeurs humanistes qu’elle a forgées ; d’autre part, l’Europe pourrait être une force de résistance dans un contexte géopolitique transfiguré par le retour dans le monde des prétentions impériales – au sens originel du terme, c’est-à-dire celui de la domination.
Dans le cadre de cette chaire, je proposerais ainsi de redéfinir collectivement une cosmogonie et une herméneutique européennes, une recherche qui pourrait être l’occasion d’un regard introspectif sur l’Europe autant que d’une réflexion sur sa place dans la globalisation.
La chaire a pour ce faire l’ambition d’ouvrir un dialogue pluridisciplinaire autour des cinq thèmes suivants :
- l’émergence d’un monde post-westphalien ;
- l’Europe souveraine ;
- le théologico-politique de la construction européenne ;
- les frontières de l’Europe et sa place dans le monde ;
- le rôle du droit européen dans la construction d’une identité et d’une puissance européennes.
La chaire ayant pour objectif de créer un espace de discussion, ce projet est ouvert aux échanges et aux contributions de tous les chercheurs intéressés par le thème général ou l’un des cinq axes précités (pour plus d’informations : francois-vivien.guiot @ univ-pau.fr).